La dernière page du livre très réussi de Fred Bernard et Émile Bravo nous apprend que ces modèles réduits d’avions de la Grande Guerre ont été fabriqués dans les tranchées par un brigadier, René Nicolas, à partir de balles et de douilles d’obus. C’est à ce titre, quand on se figure qu’ils ont été patiemment conçus par un homme, comme passe-temps, comme moyen de survie sans doute, qu’ils sont fascinants. Petits bouts d’Histoire, on comprend pourquoi ils ont inspiré Fred Bernard qui s’est fait raconteur d’une histoire, celle d’un homme ayant vécu l’enfer de la Guerre. Ces petits aéroplanes sont en effet conservés par la compagne de Fred Bernard, l’arrière-petite-fille de René revenu du front.
Cet album bien mis en mots et en images dit, tout en étant accessible aux plus jeunes, beaucoup de choses sur la guerre : la faim, la peur, la mort, le froid, les tirailleurs africains, la perte des proches, etc.
L’alternance de souvenirs d’enfance insouciante et d’épisodes de guerre, fort bien rendue graphiquement par Émile Bravo, donne le rythme au récit de René. Ces deux périodes de sa vie sont reliées par une passion pour les avions qu’il a depuis l’enfance et continue de nourrir sur le front.
La beauté de On nous a coupé les ailes réside dans la part d’espoir qu’il véhicule, même dans les pages les plus sombres. De la figure du brigadier, l’album fait ressortir l’homme, l’enfant devenu adulte, qui s’accroche, croit, espère, et se maintient en vie.
On nous a coupé les ailes, Fred Bernard & Émile Bravo, Albin Michel, 2014, 11,50€, à partir de 8 ans.
ClaireD