MARCEL ET GISELLE

MARCEL ET GISELLE

Natali Fortier

Editions du Rouergue

 

Marcel et Giselle comme de lointains parents d’Hansel et Gretel ?

Ca sonne pareil dans le titre mais au-delà d’un fil conducteur similaire, le récit est bien différent, les personnages aussi.

A vrai dire, nous entrons plutôt dans une pièce de théâtre que dans un conte. Le programme est planté dès l’ouverture avec la présentation des rôles de chacun et dès le lever de rideau, le lecteur se trouve littéralement happé par ces personnages, plus personnes réelles que héros ou héroïnes qui nous parlent, dans une adresse directe. On est tellement dans l’écoute de ces voix, aux mots parfois mystérieux mais seulement québécois, tellement dans l’empathie, dans le souci de ce qu’ils vivent, traversent, comme suspendus à leurs lèvres que c’est une fois rendus, à la fin du récit, que l’on se dit qu’on a tout entendu… mais rien vu ! Et de repartir pour une nouvelle lecture, nouvelle aventure picturale que l’on savoure, cette fois, après le rythme soutenu du premier passage, trop heureux de plonger dans un univers onirique, foisonnant, aux dimensions très particulières, décalées.. en un mot imaginaire et qui complète à merveille la traversée de toute cette histoire.. parce qu’il y en a une. Une à plusieurs voix, qui raconte la misère qui pousse à la déprime, chamboule les familles, chasse les enfants sur les chemins pour découvrir un autre monde où la douceur acidulée digne des meilleures confiseries se révèle piégeuse et effrayante… même si, ici, l’ogresse est une chanteuse, Armande qui elle aussi, a son vécu. Des parcours qui s’entremêlent pour tisser une fin inattendue.

Un album à découvrir seul ou encore mieux, en lecture partagée.

Rien que pour la gourmandise, nous reprendrons bien quelques tranches de texte.

« Ca fait qu’ils ont décidé comme ça, sans prendre la peine de m’en parler, de partir. Oh là là là ! Si j’avais su ! Maudit. »

«  Je suis navrée mon p’tit gars, j’ai quitté ma famille, toute jeunette, je voulais rompre avec cette tradition bien niaiseuse de manger des enfants ; mais là, c’est pas pareil, c’est pour la bonne cause. C’est pas par gourmandise, c’est pour la science ! »

«  La peur m’a pognée au cœur. J’ai plus dit un mot, elle voulait juste que je mange, mais moi là, c’était fini, sans toi, j’avais le ventre noué. Je ne pouvais plus rien avaler. »

 

Sylvie Heyraud


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