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Bird, Crystal Chan
De la solitude, dans Bird, il y en a. De la vraie, de la pesante. Tous les membres de cette famille habitant l’Iowa, père, mère, grand-père et fille, sont insupportablement seuls depuis que John, le grand frère est mort. Surnommé Bird par son grand-père, John a réellement voulu s’envoler et a chuté du haut de la falaise. Depuis, Grandpa, rongé par la douleur et la culpabilité, a cessé de parler. Jewel vit le deuil depuis toujours car c’est justement le jour de sa naissance que son frère a sauté. Au début du roman apparaît un autre John, neveu du voisin, qui va remuer la vie de Jewel et de sa famille.
Le personnage de Jewel est formidablement attachant. On comprend sa révolte, son besoin de vie, d’amitié. On ressent avec elle l’insoutenable absence, tout autant qu’on attend avec elle que les vannes s’ouvrent, que Pa, Ma, Grandpa s’autorisent enfin à pleurer et à s’éloigner de ce malheur enfermant. Je retiendrai cette Jewel qui parle aux pierres, et revient toujours à la falaise qui lui est interdite. Je retiendrai les descriptions de la nature, les relations magiques que les personnages entretiennent avec elle. Je retiendrai l’Iowa, la chaleur, le ciel, les moustiques. Je retiendrai ces croyances jamaïcaines en des forces ambivalentes de la nature qui sont autant de façons de comprendre et d’agir sur le monde.
Bird, Crystal Chan, traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Marmiesse, Éditions Hélium, 14,90€
ClaireD

Casseurs de solitude
La littérature permet de se frayer un chemin parmi les solitudes des personnages. Pénétrer ces solitudes, c’est découvrir des mondes bouillonnants, des idées régénérantes. Dans la vraie vie, tout « cassage de solitude » signifie rencontre. Deux êtres qui, à un moment donné, cassent leur solitude découvrent en l’autre un petit héros, s’enrichissent mutuellement. Ces moments de vie, et les personnes avec qui on les partage, sont suffisamment rares, et d’autant plus précieux.
Les neuf nouvelles d’Hélène Vignal, racontent, chacune, un cassage de solitude. Les adolescents que l’auteure met en scène se découvrent des pensées, des perspectives inattendues, des forces de vie insoupçonnées. Les sujets sont variés, chaque personnage a un parcours fort différent. Celui-ci « subit » un stage de troisième à la Préfecture, celle-là vit une amitié exceptionnelle avec un cheval, celle-ci découvre l’homosexualité de son père, celui-là s’ennuie, celle-ci évite de justesse l’excision, etc. Mais il arrive qu’une histoire déborde dans une autre. Des retrouvailles imprévues d’un personnage d’une nouvelle à l’autre ajoutent à l’activité du lecteur, obligé d’établir des connections. Et le lecteur est toujours heureux qu’on l’admette ainsi – j’emprunte ces termes à Christian Bruel – « dans la communauté des faiseurs de sens ».
Casseurs de solitude, Hélène Vignal, Le Rouergue, 11€, dès 13 ans

Aujourd’hui, un grand entretien avec l’éditrice de Kanjil
Dans la jungle du marché que Lise Bourquin Mercadé connaît particulièrement bien – elle a derrière elle une carrière réussie dans la publicité – existe, de par la volonté de sa tenace créatrice, une petite et passionnante maison d’édition. Passionnante pour ses publications, pour son histoire, pour ses artistes et pour celle qui porte tout cela, Lise Bourquin Mercadé. Kanjil publie des « récits du passé pour comprendre le présent », denses, exigeants, souvent tirés et inspirés du patrimoine oral et écrit, complétés par des documents, des témoignages, souvent enregistrés avec des chansons et des musiques.
Dans l’entretien que Lise Bourquin Mercadé nous a aimablement accordé ressort une puissante volonté d’offrir une édition militante, qui ne cherche jamais la facilité. Lire la suite
Enfance et musique
On ne peut pas parler chanson sans citer l’association “Enfance et musique” qui, depuis plus de 25 ans, par des actions, des formations, des publications, s’est donné pour objectif le développement des pratiques artistiques vivantes dans la vie sociale et familiale des petits. Le Label de disques Enfance et Musique propose un large éventail de disques et de livres disques pour les enfants dès la naissance. Chansons traditionnelles, jazz, musiques du monde, créations, le catalogue est large et fourni. Ses disques, pour nombre d’entre eux des produits phares, sont remarquables par la qualité de l’interprétation et l’implication artistique.
Avec d’autres Enfance-et-Musique-addicts, on se demande souvent quel disque du catalogue on préfère. Personnellement, je n’ai jamais réussi à choisir entre A l’eau et Tangonino !
ClaireD
Pirouette
Dans la collection Pirouette chez Didier jeunesse, un artiste propose son interprétation d’une chanson. C’est au rythme du texte de la chanson que les pages sont tournées, les images attentivement observées. Parions que Une poule sur un mur, mis en scène par Stéphanie Devaux, La famille tortue, par Marie Mahler, ou Jean Petit qui danse par Charlotte Mollet – mais je pourrais tous les citer – ne resteront pas longtemps tout beaux tout neufs après l’achat, plébiscités qu’ils seront par les enfants.
Un conseil de lecture par un peintre
Même Renoir, l’Auguste, cite Les Vieilles chansons de Boutet de Monvel !
Dans cette toile de 1884, L’Après-midi des enfants à Wargemont, la fillette sur le canapé feuillette le recueil de Boutet de Monvel dont nous avons récemment vanté les mérites…
Louis-Maurice Boutet de Monvel, Vieilles chansons et rondes pour les petits enfants et les Chansons de France pour les petits Français, 14,80€, Lutin poche 5,60€.

Vieilles chansons et rondes, Chansons de France, Boutet de Monvel
Les Vieilles chansons et rondes pour les petits enfants et les Chansons de France pour les petits Français, admirablement illustrées par Louis-Maurice Boutet de Monvel dans les années 1883-84, et rééditées par l’école des loisirs, témoignent d’une véritable recherche sur la forme de la part de l’illustrateur. Chaque recueil est un petit chef d’œuvre, dans lequel la composition est recherchée, le mouvement et l’expression toujours justes. Les procédés graphiques que Boutet de Monvel emploie, délimitation des formes, miniaturisation, absence fréquente d’arrière-plan, caractérisent son mode de représentation des enfants (que l’on le retrouve aussi dans son illustration des Fables).
Des effets malicieux (par exemple l’alignement des enfants par taille croissante), la minutie des dessins et de la mise en page, les détails des costumes témoignent du soin apporté par l’artiste à ces recueils de chansons.
Louis-Maurice Boutet de Monvel, Vieilles chansons et rondes pour les petits enfants et les Chansons de France pour les petits Français, 14,80€, Lutin poche 5,60€.
Enfantines / Berceuses, Bruley, Tourn, Dumas
Enfantines, de Marie-Claire Bruley et Lya Tourn, précieux recueil publié en 1988 et illustré par le grand Philippe Dumas, regroupe les formulettes traditionnelles de la toute petite enfance, celles qui sont des « médiateurs d’échanges d’une grande intensité dans le « corps à corps » entre l’adulte et l’enfant », comme il est écrit dans l’introduction.
Véritables massages langagiers, ces jeux de sauts, de balancements, de caresses permettent à l’enfant de faire l’expérience de ses limites corporelles. Une seule petite comptine comme « La petite bête qui monte », un seul petit jeu de « A dada sur mon bidet » est un moteur d’échange car il contient tout : la voix, le ton, le rythme, le regard. Destiné à « ceux qui se passionnent pour les débuts de la vie », le recueil donne pour chaque comptine le texte, les variantes, la gestuelle ; il contient aussi des explications littéraires et psychanalytiques sur les formules qui aident à comprendre leur universalité.
Enfantines, Jouer, parler avec le bébé, Marie-Claire Bruley et Lya Tourn, illustrations de Philippe Dumas, L’école des loisirs, 30,50€
Berceuses et paroles pour appeler le sommeil, Marie-Claire Bruley et Lya Tourn, illustrations de Philippe Dumas, L’école des loisirs, 30,50€
ClaireD

Chansons bilingues
Par essence intraduisible, la chanson d’enfance d’un pays ne peut qu’être « cousine » d’une chanson d’un autre pays. La collection Les petits cousins met ainsi en résonance des chansons du répertoire français et des chansons du répertoire d’un autre pays.
Chaque album-CD bilingue, réunit des comptines, des rondes, des jeux de doigts, des berceuses avec des commentaires sur les danses, les mimes et des explications sur les textes. Deux chansons issues du répertoire traditionnel de chaque pays sont regroupées sur une double-page en fonction de leur thème, leur mélodie, leur correspondance visuelle. Les arrangements sont agréables et les illustrations de grande qualité.
En France, l’enseignement des langues a – c’est peu dire – quelques progrès à faire ! Pour l’ouverture culturelle et linguistique aux autres pays européens, cette collection est idéale.
ClaireD